• Homme libre, toujours tu chériras la mer !
    La mer est ton miroir ; tu contemples ton âme
    Dans le déroulement infini de sa lame,
    Et ton esprit n’est pas un gouffre moins amer.

    Tu te plais à plonger au sein de ton image ;
    Tu l’embrasses des yeux et des bras, et ton coeur
    Se distrait quelquefois de sa propre rumeur
    Au bruit de cette plainte indomptable et sauvage.

    Vous êtes tous les deux ténébreux et discrets :
    Homme, nul n’a sondé le fond de tes abîmes ;
    Ô mer, nul ne connaît tes richesses intimes,
    Tant vous êtes jaloux de garder vos secrets !

    Et cependant voilà des siècles innombrables
    Que vous vous combattez sans pitié ni remord,
    Tellement vous aimez le carnage et la mort,
    Ô lutteurs éternels, ô frères implacables !

    Charles Baudelaire


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  • Automne


    Dans le brouillard s'en vont un paysan cagneux
    Et son boeuf lentement dans le brouillard d'automne
    Qui cache les hameaux pauvres et vergogneux

    Et s'en allant là-bas le paysan chantonne
    Une chanson d'amour et d'infidélité
    Qui parle d'une bague et d'un coeur que l'on brise

    Oh! l'automne l'automne a fait mourir l'été
    Dans le brouillard s'en vont deux silhouettes grises

    Guillaume Apollinaire (1880 - 1918)


    GUILLAUME APOLLINAIRE

    " On a volé la Joconde"  . C'est le titre de l'incroyable nouvelle qui figure à la  une des journaux le 22 août 1911.Et ce n'est pas tout : de nombreux objets d'art exposés au Louvre, des statuettes notamment, on précédé Mona Lisa sur le chemin de l'exil forcé ou des amateurs les contemplent à loisir,  ébahis et éblouis!  Picasso justement fait partie de ces contemplateurs qui confinent au contemplatif ...

    Picasso ? un voleur ? Point du tout : Picasso a acheté deux statuettes à un aventurier belge Gery Pieret qui en a vendu une troisième à Paris Journal ... Le Louvre , à cette époque est l'hybridation du moulin , on y entre sans contrôle,  ....

    Lorsque Picasso apprend l'affaire, il court chez Guillaume Apollinaire qui a servi d'intermédiaire lors de la vente des statuettes..   Que faire ? Le peintre et le poète pensent à jeter les oeuvres d'art dans la Seine. Mais ils se ravisent et les portent ..au Paris Journal..  Le scandale est énorme : la police perquisitionne chez Apollinaire soupçonné du vol de la Joconde ! Il est alors incarcéré à la prison de la Santé;... Gery Pieret l'innocente.. Une pétition circule afin que le poète soit libéré, ce qui est fait le 12 septembre 1911...  les statuettes retrouvent leur place au Louvre, la Joconde qui avait été volée par un artisan italien est retrouvée le 10 décembre à Florence.

    Cet épisode marque profondément Wilhelm Apollinaris de Kostrowisky, né le 26 août 1880 à Rome , d'une mère issue de l'aristocratie polonaise  et probablement d'un noble italien..

    Avant cette aventure de 1911 la vie de Guillaume Apollinaire est une suite de péripéties où l'étrange le dispute au pathétique...

    Étrange la conduite de Mme de Kostrowitzky laissant ses deux garçons sans ressources près de Spa en Belgique ou elle a tout perdu au jeu : elle leur demande de quitter l'hôtel ou ils séjournent sans payer et de la rejoindre à Paris...

    Pathétique les amours de Guillaume qui tente de séduire une Maria  à 19 ans, une Linda à 20 ans, une Annie à 21 ans, une Yvonne a 23 ans,  et enfin Marie Laurencin à 27 ans en 1907. Le douanier Rousseau fait leur portrait en 1908 ., Guillaume et Marie se séparent  en 1912, Marie du Pont Mirabeau " Ni  temps passé ni les amours reviennent / sous le pont Mirabeau coule la Seine ".....

    Auteur de centaines d'articles dans des journaux et des revues,n  de livres lestes  ou sérieux, Apollinaire fait paraître son oeuvre majeure en 1913. Elle porte d'abord le titre " Alcools" ...  En 1914 Apollinaire séduit une Louise et s'engage dans l'artillerie. En 1915 il rencontre dans le train  une Madeleine qui le console de sa rupture avec Louise...  Il devient officier d'infanterie... En 1916  il est naturalisé français... A Berry au Bac le 17 mars  un éclat d'obus pénètre dans sa tempe droite, il est trépané...

    En 1917 il compose ses Calligrammes qui paraissent en avril 1918.. Son dernier amour la jolie rousse Jacqueline Koll devient sa femme le 2 mai 1918 . Six mois plus tard, deux jours avant l'armistice, il meurt de la grippe espagnole... 


    Le Pont Mirabeau

    Sous le pont Mirabeau coule la Seine
                Et nos amours
           Faut-il qu'il m'en souvienne
    La joie venait toujours après la peine
     
         Vienne la nuit sonne l'heure
         Les jours s'en vont je demeure
     
    Les mains dans les mains restons face à face
                Tandis que sous
           Le pont de nos bras passe
    Des éternels regards l'onde si lasse
     
         Vienne la nuit sonne l'heure
         Les jours s'en vont je demeure
     
    L'amour s'en va comme cette eau courante
                L'amour s'en va
           Comme la vie est lente
    Et comme l'espérance est violente
     
         Vienne la nuit sonne l'heure
         Les jours s'en vont je demeure
     
    Passent les jours et passent les semaines
                Ni temps passé
           Ni les amours reviennent
    Sous le pont Mirabeau coule la Seine
     
         Vienne la nuit sonne l'heure
         Les jours s'en vont je demeure

    Guillaume Apollinaire (1880 - 1918






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  • JE SUIS.....


    Je suis....
    Je suis le bleu du ciel et l'ocre de la terre
    Le vent de la forêt
    Le rouge du pavot
    La blancheur de la plume et le noir du mystère
    Je vibre dans le jaune habillant l'abricot
    Sanglote dans le gris des plus funestes orages
    Et ruisselle dans l'or de l'âme du soleil
    Je suis dans les reflets du pllus petit rivage
    Le mauve du lilas
    Le rose sans pareil de la fleur éternelle et des feux du flamant
    Je suis tous les reflets argentés de la lune
    Au coeur de la moindre étoile
    Au bord du firmament
    Et ceux ou te sourit la blondeur de la dune
    Dans le trille du merle
    Le rire du ruisseau
    J'éclate en mille sons ou chante la tendresse
    Vibrato de bonheur comblant chaque ruisseau
    Et je danse toujours dans le feu qui se dresse
    Je suis tous les flocons doux cristaux de neige
    Qui dessinent dans l'air leur valse de froid
    Et les gouttes de pluie en rondes ou manège
    abreuvant le sol sec lorsque l'été fait loi
    Je perle dans la sève éttofant les ramures
    Dans les sillons du champs que l'homme a labouré
    Ou geint le souvenir d'un grand choc des armures
    Et niche la colombe au tendre bec doré
    Je suis clair,je suis sombre à tout instant du jour
    Mes couleurs sont partout dans l'ombre ou la lumière
    Mes chagrins, ma colère et surtout mon amour
    Je suis le cri du vent
    Sa chanson coutumière
    L'arôme de la mousse et le goût des embruns
    Je transperce la nuit des mes clartés sans nombre
    Je donne leur nuance aux plus simples des parfums
    Et je chante pour toi lorsque ton coeur est sombre
    Regarde - moi .....sens -moi.....
    Toi, qui dans tes hivers recherche une lueur et la force de vivre
    Car je suis toujours là
    Je me nomme " UNIVERS "
    et je m'offre en ami pour tout ce que je livre......


    Tres beau texte de Johanne Hauber -Bieth......

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  • 4saisons-3.jpgA
    Au printemps de leur vie
    Le amants se convoitent avec envie
    C’est le temps des folles passions
    Ils sont prisonniers de leurs propres pulsions

    Dans l’été de leur vie
    Ils découvrent l’amour
    Mélange d’envie et de désir
    Sentiment plus profond qui rime avec toujours

    Dans l’automne de leur vie
    Ils découvrent la tendresse
    Sentiment immortel qui rime avec sagesse
    Et qui grandit sans cesse

    Dans l’hiver de leur vie
    Les amants vivent de leur souvenirs
    De tout ce qui , jour après jour , a fait leur plénitude
    Ils ont atteint le véritable amour avant leur finitude


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  • Sans bruit, sous le miroir des lacs profonds et calmes,
    Le cygne chasse l'onde avec ses larges palmes,
    Et glisse. Le duvet de ses flancs est pareil
    A des neiges d'avril qui croulent au soleil;
    Mais, ferme et d'un blanc mat, vibrant sous le zéphire
    Sa grande aile l'entraîne ainsi qu'un lent navire.
    Il dresse son beau col au-dessus des roseaux,
    Le plonge, le promène allongé sur les eaux,
    Le courbe gracieux comme un profil d'acanthe,
    Et cache son bec noir dans sa gorge éclatante.
    Tantôt le long des pins, séjour d'ombre et de paix,
    Il serpente, et, laissant les herbages épais
    Traîner derrière lui comme une chevelure,
    Il va d'une tardive et languissante allure.
    La grotte où le poète écoute ce qu'il sent,
    Et la source qui pleure un éternel absent,
    Lui plaisent; il y rôde; une feuille de saule
    En silence tombée effleure son épaule.
    Tantôt il pousse au large, et, loin du bois obscur,
    Superbe, gouvernant du côté de l'azur,
    Il choisit, pour fêter sa blancheur qu'il admire,
    La place éblouissante où le soleil se mire.
    Puis, quand les bords de l'eau ne se distinguent plus,
    A l'heure où toute forme est un spectre confus,
    Où l'horizon brunit rayé d'un long trait rouge,
    Alors que pas un jonc, pas un glaïeul ne bouge,
    Que les rainettes font dans l'air serein leur bruit,
    Et que la luciole au clair de lune luit,
    L'oiseau, dans le lac sombre où sous lui se reflète
    La splendeur d'une nuit lactée et violette,
    Comme un vase d'argent parmi des diamants,
    Dort, la tête sous l'aile, entre deux firmaments.

    SULLY PRUDHOMME

     

     


    ze55ri3p cygne

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